Une "Ligue de protection des vers de terre" : pourquoi l'idée n'est pas si farfelue | TF1 INFO (2024)

Le ver de terre, élément essentiel de la préservation des terres, est aujourd'hui en danger en raison de l'agriculture intensive et de l'artificialisation des sols.

Pour tenter de sauver ce petit animal encore mal connu, un agronome a lancé une "Ligue de protection des vers de terre".

Un projet pas si farfelu. Explications.

À première vue, l'initiative peut prêter à sourire. Lundi 22 avril, à l'occasion de la journée mondiale de la Terre, l'agronome Christophe Gatineau a annoncé la création d'une organisation surprenante : la "Ligue de protection des vers de terre".Celui qui défend le petit animal depuis des années veut ainsi "poser les mots" et "préserver les vers de terre". Pourquoi ? "Tout simplement parce que notre alimentation, nos habits, nos carburants, notre électricité viennent des sols. Et que les sols, c'est l'habitat du ver de terre", lance-t-il à TF1info. Explication sur le rôle vital que joue Lumbricina pour notre agriculture et notre souveraineté alimentaire.

Le quatrième producteur mondial de nourriture

Car le ver de terre est indispensable à nos sols et à notre production agricole. En 2020, une étude publiée notamment par l'Inrae (Institut national de la recherche agronomique) a rappelé que "par la fonction qu'ils assurent, les vers de terre sont un élément essentiel des écosystèmes terrestres". L'État français a d'ailleurs reconnu, dans un texte publié au Journal officiel en 2021, que ces petit* animaux étaient indispensables à la fertilité et à la durabilité des sols. Et les chiffres le prouvent : selon une étude parue en septembre 2023 dans la revue Nature Communications, les lombrics contribuent à plus de 6% du rendement céréalier à travers le monde et à plus de 2% de toutes les légumineuses produites sur la planète, soit l'équivalent de 140 millions de tonnes de nourriture. Pour donner un exemple, s'ils étaient un pays, les vers de terre se hisseraient à la 4e place mondiale des producteurs, au niveau de la Russie.

Cette prouesse s'explique par leur activité, qui stimule la productivité des plantes. "Il y a un cycle de l'alimentation, comme le cycle de l'eau, où le ver va nourrir la plante", explique Christophe Gatineau. En creusant dans la terre, le petit animal permet une meilleure diffusion de l'eau de pluie, il avale également des éléments organiques qu'il digère, apportant ainsi des éléments nutritifs aux plantes. "Le sol est un monde microbien avec des champignons, des bactéries et des vers de terre qui est une sorte de clé de voûte. S'il disparaît, c'est tout l'écosystème qui s'effondre, c'est comme une mer sans poissons", appuie l'agronome.

Des vers de terre qui meurent de faim

Problème, depuis des années, l'artificialisation des sols et l'agriculture intensive ont mis à mal le développement de Lumbricina. Car en utilisant des engrais, des pesticides et d'autres produits chimiques et en travaillant de façon continue les parcelles, l'homme a appauvri les sols et réduit la nourriture disponible pour les vers. "Les vers de terre meurent de faim", pointe Christophe Gatineau. "Bien sûr, il y a également les pesticides et certains itinéraires agricoles, mais la première cause de mortalité, c'est la faim".

Si dans les prairies naturelles, le ver de terre reste en bonne santé, dans les sols cultivés, la situation est alarmante, pointe le chercheur. Or, c'est dans ces sols qu'il est le plus important pour assurer le rendement agricole. "Aujourd'hui, tout le monde tire la sonnette d'alarme alors que nous, agronomes, on la tire depuis 20, 30, 40 ans. Le sol est une ressource rare sur la planète, épuisable et moins de 6% des sols peuvent nourrir. Sur ces 6%, vous en avez plus de la moitié qui sont dégradés à des niveaux divers". D'où l'urgence à sauver les vers de terre, qui représentent la première biomasse animale des sols, avec environ 5000 espèces répertoriées à travers le monde, dont 140 en France et 400 en Europe.

  • Lire aussiGlaciers, parc national, décharges littorales… le plan du gouvernement peut-il enrayer l'érosion de la biodiversité en France ?

C'est dans ce but que Christophe Gatineau a créé sa Ligue de protection des vers de terre, qui entend mettre fin à "l'inexistence juridique" de l'animal. "On demande une reconnaissance juridique des vers de terre. L'idée n'est pas de le protéger comme on protège le loup en France, mais de lui donner une existence juridique". Et l'agronome de prendre l'exemple des abeilles mellifères pour illustrer les avantages de ce statut : "Si vous prenez l'abeille, elle a quelques droits. Pas beaucoup, mais on lui reconnaît le droit de polliniser. Ce n'est pas le cas du ver de terre. Un agriculteur, s'il utilise des pesticides, connaîtra son impact sur les pollinisateurs ou les milieux aquatiques, mais pas sur la vie des sols et des vers de terre". Une nécessité aujourd'hui plus que jamais, alors que la disparition des vers "met en danger notre souveraineté alimentaire", assure Christophe Gatineau.

Une "Ligue de protection des vers de terre" : pourquoi l'idée n'est pas si farfelue | TF1 INFO (2024)
Top Articles
Latest Posts
Article information

Author: Nathanial Hackett

Last Updated:

Views: 6550

Rating: 4.1 / 5 (52 voted)

Reviews: 91% of readers found this page helpful

Author information

Name: Nathanial Hackett

Birthday: 1997-10-09

Address: Apt. 935 264 Abshire Canyon, South Nerissachester, NM 01800

Phone: +9752624861224

Job: Forward Technology Assistant

Hobby: Listening to music, Shopping, Vacation, Baton twirling, Flower arranging, Blacksmithing, Do it yourself

Introduction: My name is Nathanial Hackett, I am a lovely, curious, smiling, lively, thoughtful, courageous, lively person who loves writing and wants to share my knowledge and understanding with you.